Nouvelle
58 % et 48 %. Voilà les taux respectifs sidérants d’anémie chez les enfants de moins de cinq ans et les femmes de 15 à 49 ans en Tanzanie.
Ces statistiques sont d’autant plus choquantes que la production agricole de Tanzanie est à la fois abondante et extrêmement diversifiée. Cependant, 15 % à 40 % des cultures sont perdues après les récoltes, laissant des milliers d’habitants en proie à la faim, la malnutrition et l’anémie. Le problème de la faim en Tanzanie provient moins d’un manque de production d’aliments que d’obstacles dans la chaîne de gestion des aliments.
Mon nom est Nadia Lampkin et je suis une volontaire à long terme du programme Uniterra en Tanzanie, travaillant comme analyste de politiques et de recherche avec Agricultural Non State Actors Forum (ANSAF) à Dar es-Salaam. Au cours des six derniers mois, mon rôle a consisté en grande partie à travailler avec Rehema Msamy, agente de projet, sur le volet des communications, des politiques et du plaidoyer du projet Fast Track.
Le projet Fast Track est mis en œuvre à travers différentes régions de Tanzanie. Il vise à améliorer la nutrition des enfants en distribuant des variétés améliorées de patates douces. Au début du projet, Rehema m’a expliqué que bien qu’elle avait beaucoup d’expérience en communication, elle souhaitait s’améliorer en analyse de politiques de manière à mieux pouvoir influencer le gouvernement à augmenter l’enveloppe budgétaire pour la nutrition. J’ai dit à Rehema : « Deviens experte en la matière et tes connaissances parleront d’elles-mêmes ».
Ensemble, nous avons mené beaucoup de recherches sur la malnutrition et la faim en Tanzanie. Nous avons découvert que la malnutrition était un enjeu à la fois de santé et économique. Nous avons trouvé une statistique incroyable : il y a en Tanzanie 2,7 millions d’enfants de moins de cinq ans avec des retards de croissance. Nous avons alors rédigé un document autour de cette information, démontrant que la situation de ces enfants représentait une perte de potentiel économique et humain abominable.
Non seulement les problèmes de nutrition représentent-ils un énorme fardeau pour le secteur de la santé du pays, ils génèrent également d’importantes pertes de revenus potentiels. À moins que la situation nutritionnelle en Tanzanie ne s’améliore d’ici à 2025, les pertes économiques estimées pour le pays s’élèveront à 20 milliards de dollars américains. Pour que le pays puisse prévenir cette perte de potentiel économique, il doit investir dès aujourd’hui dans des programmes de nutrition et dans son système de gestion des aliments.
J’ai offert à Rehema des formations sur la rédaction de documents clairs et concis basés sur des statistiques. Ces nouvelles compétences techniques lui ont fourni une base solide pour alimenter sa passion et sa détermination à lutter pour que son pays prenne plus au sérieux l’enjeu de la nutrition.
Bien que les efforts de plaidoyer demandent du temps, Rehema a déjà pu constater des résultats importants. À l’occasion de dialogues de district, 9 des 13 agents gouvernementaux participant se sont engagés à augmenter leur budget pour les programmes nutritionnels, et deux membres du parlement se sont faits porte-paroles pour la nutrition. Ces personnes continuent à œuvrer pour que la nutrition figure dans les budgets locaux et national.
En aidant Rehema à aborder le plaidoyer du côté de la recherche et des connaissances plutôt que d’un point de vue politique, elle a maintenant un plus grand impact au niveau local et national. En appuyant la mission de l’ANSAF, je suis dans une position privilégiée pour constater que bien que les changements politiques prennent leur temps, grâce à des programmes comme Uniterra, des leaders émergeant-e-s comme Rehema peuvent obtenir les outils qui leur permettent d’améliorer les conditions de vie des jeunes et des femmes de leurs communautés.