Témoignage

Les défis sur notre route

Népal
Publié par : Vincent Auclair

Déjà à la mi-parcours de mon mandat avec T-Help et l’aventure continue.

Sur le plan de la Covid-19, le Népal est toujours confronté à une crise sanitaire. Sur le terrain, le confinement est encore en vigueur dans les grandes villes et la vie au quotidien est au ralenti. Selon mes collègues népalais, le nombre de personnes infectées ne semble pas diminuer et le système de santé demeure extrêmement fragile, pour ne pas dire dépassé par la situation.

Le plus grand défi pour le Népal est l’accessibilité au vaccin. Depuis quelques mois, le Népal a commencé sa campagne de vaccination grâce au soutien généreux du gouvernement de l’Inde. Mais aujourd’hui la situation est toute autre. En vertu d’une ordonnance provisoire de la Cour suprême de l’Inde, le gouvernement indien a complètement interdit l’exportation du vaccin Covidshield produit sur son territoire. Ce qui inclut également les doses pour le Népal. Cette situation est encore plus inhabituelle car le Népal et l’Inde pratiquent une approche de frontière ouverte (liberté de circulation des biens et des personnes).

Ce qui rend la situation plus frustrante est que le Népal avait commencé la vaccination des personnes âgées en mars grâce au support de l’Inde. Mais en raison de l’interdiction de l’exportation des vaccins, c’est plus de 1,4 millions de personnes âgées qui sont en attentes d’une deuxième dose.

En date d’aujourd’hui, moins de 5% de la population népalaise est entièrement vaccinée (Johns Hopkins, University & Medicine, Coronavirus Ressource Center) et la possibilité d’une troisième vague devient de plus en plus réelle.

Une bonne nouvelle toutefois : dans le cadre de l’engagement du président américain Joe Biden de partager 80 millions de doses de vaccins fabriqués au États-Unis, le Népal va recevoir 1.5 millions de doses du vaccin à dose unique de Johnson & Johnson  .

En ce qui concerne mon mandat, je suis plus motivé que jamais. Les recherches et la cueillette de données vont bien. Ce qui me rassure le plus, c’est la grande transparence  dans les réponses des membres de T-Help. Ils confirment que les réalités culturelles népalaises, c’est-à-dire, le système des castes et la culture hindouiste,  ont un effet direct sur les chances de réussites des participantes à leurs diverses formations.

Selon les chiffres obtenus des membres de T-Help, 3000 personnes (femmes et hommes) ont participé à leur formation au cours des années. De ce nombre, 75 % sont des femmes.

Grâce aux efforts et au support soutenus des membres de T-Help, 60 % de tous les participants terminent la formation (1800 personnes) et de ce pourcentage, plus ou moins 75 % réussissent à partir en affaires (900 femmes et 300 hommes).

Les raisons soulevées par ceux et celles qui n’ont pas démarré ou qui ont dû cesser l’exploitation de leur entreprise sont: manque de soutien financier, absence d’intérêt pour l’agriculture, peu de connaissance du marché, faible marge de profit sur la vente des produits, absence d’intérêt pour le vermicompostage par les agriculteurs locaux (préfèrent les engrais chimiques), difficulté de prendre de l’expansion en raison d’un marché limité ou en raison de manque d’espace pour croitre et rentabiliser l’entreprise, sans oublier le manque de soutien familial.

Pourquoi cette raison? Tout simplement parce que derrière « le manque de soutien familial » se cache plusieurs obstacles qui empêchent les femmes népalaises d’atteindre plus d’autonomie. Nous pouvons les divisés en traditions, lois, restrictions économiques et barrières. Concernant les traditions, le Népal est une société patriarcale. Elle s’est développée ainsi au fil des siècles.  Elle est directement influencée par la culture hindouiste et le système des castes. La culture de caste est une cause majeure d’injustice et de discrimination à l’égard des femmes dans la société népalaise. Cette situation perdure malgré l’adoption de lois plus progressives au cours des dernières années et la signature de plusieurs accords internationaux par le Népal sur l’égalité des genres. Encore aujourd’hui, les filles et les jeunes femmes, accablées par les tâches ménagères et les restrictions sociétales, courent un risque élevé d’abandonner l’école avant même d’avoir terminé le niveau primaire.

D’ailleurs un rapport de la Commission nationale des femmes sur le statut socio-économique des femmes au Népal présente des preuves que les femmes ont un accès limité à l’éducation, aux services de santé, aux processus de prise de décision, à la propriété, sécurité sociale et la liberté individuelle.

De plus, en raison du système patriarcal existant (qui est beaucoup plus présent dans les milieux ruraux que dans les milieux urbains) la plupart des femmes qui participent aux formations de T-Help sont confrontées à un manque de fonds et  à la difficulté d’avoir accès à un lopin de terre.

C’est un rappel constant que bien que le Népal a fait des progrès, l’égalité des sexes n’est pas encore une réalité.

Toutefois, l’existence d’organisme tel que T-Help fait une différence dans la vie quotidienne au Népal.  Je crois sincèrement, que pour chacune des jeunes filles et femmes qui participent à la formation offerte par T-Help, c’est un début d’épanouissement et d’autonomie qui se confirme.

Malgré que nous aimerions que le changement soit plus rapide, il faut reconnaître qu’il n’est pas facile  de changer la mentalité des gens. Cela ne vaut pas seulement pour le Népal, nous avons tous encore du travail à accomplir pour arriver à une réelle égalité femme / homme.

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