Témoignage

Faire un stage à l’international… dans son salon!

Canada
Publié par : Virginie DeChamplain

Cette réalité qui est la mienne et celle de mes collègues depuis les derniers mois (et pour les prochains), est assez spéciale. Alors que nous nous attendions à devoir naviguer l’immersion dans une nouvelle culture, un nouveau milieu, une nouvelle langue peut-être même, nous avons dû apprendre à naviguer toutes ces choses, mais sans l’immersion. 

C’est ce qui, de prime abord, m’a semblé le plus déroutant. De chercher à s'imprégner, à expérimenter un autre milieu sans pouvoir y être physiquement. En s’embarquant dans un parcours scolaire en développement international, on se visualise beaucoup sur le terrain; on s’imagine rencontrer des gens, pouvoir aborder les problèmes de front, ressentir réellement de nouvelles connexions, apprendre des autres et de soi, pousser ses limites. C’est pour la plupart le «goal», le plan, une façon concrète d’acquérir de l’expérience professionnelle et de pouvoir appliquer toutes ces choses qu’on apprend dans les livres. Ce souffle aventureux est resté pris dans ma gorge cet hiver. Loin d’être mort, mais un peu en dormance. 

L’expérience, toutefois, à mon avis, n’en est pas moins enrichissante. 

Vivre le développement international à distance permet, premièrement, de relativiser et de remettre en question beaucoup. Personnellement et en tant que milieu aussi. En tant qu’individu, ce fut pour moi une occasion de me questionner et me re-questionner sur mes privilèges. Comment pourrais-je me permettre d’être déçue de ne pas «partir en voyage» quand la situation actuelle est le théâtre de l’exacerbation des inégalités et de la pauvreté, du recul d’une multitudes d’acquis pour les femmes, de famines, de décès qui auraient pu être évités, de violences, d’anxiété et d’autres d’histoires d’horreur. Et pas seulement dans le monde, autour de moi, dans mon quartier, dans ma ville, dans ma communauté, mes ami.e.s. Cela doit être l’une des phrases que j’ai répondu le plus souvent aux gens qui me demandaient si j’étais déçue que mon stage se passe en virtuel : «Je ne peux simplement pas chialer». Je ne peux pas chialer d’être au chaud, d’avoir le ventre plein et de me réaliser professionnellement. Sans fermer les yeux sur ma propre santé mentale, j’ai redirigé beaucoup d’énergie à savoir ce que je pourrais faire de plus pour aider autour; dons de vêtements, dons à des organismes que j’aime, à la banque alimentaire du coin, soutenir les commerçants locaux, prendre part à une ligne téléphonique de soutien pour les personnes seules, bref, pratiquer à ma petite échelle ces actions équitables que je prône à tous les jours dans mon poste d’agente de recherche en égalité des genres.

Puis, en tant que milieu, que domaine, la situation de la pandémie nous force à repenser le développement et la coopération internationale. C’est une des choses qui me stimule le plus de ce milieu : sa capacité à constamment s’auto-évaluer et à chercher à faire mieux. La pandémie, en plus de mettre à nu et de creuser divers sillons d’égalités dans les populations, le système de santé, les milieux de travail, les familles, ect. a dégagé beaucoup de considérations auxquelles il faudra s’attarder dans les plus brefs délais (et/ou auxquelles on s’attarde déjà), mais fait aussi revisiter la façon d’adresser et d'appréhender ces situations, la façon de penser et de mettre en œuvre l’aide et la collaboration internationale. Les effets de cette pandémie se feront ressentir sur le long terme. Étant encore néophyte dans le milieu, je n’ose pas exactement me prononcer sur ce point, mais j’ai l’impression qu’un resserrement sur la mission et qu’une priorisation et valorisation des actions et acteur.rice.s locaux sont en train de s’effectuer. Ce sont à mon sens de très bonnes nouvelles. Si on prend aussi en compte l’impact environnemental positif de la diminution des déplacements internationaux, on arrive à sortir quelques points positifs de cette situation difficile.

Bref, trois mois se sont (déjà!) écoulés depuis le début de mon stage, et bien que je vous avouerai en avoir un peu ras-le-bol de Google Meets et Zoom, j’ai l’impression d’intégrer et d’apprendre énormément sur un milieu passionnant et sur moi-même, en plus de faire partie d’une grande et belle équipe et de m’y réaliser. J’ai bien hâte de vous parler, dans mon prochain billet, de ce que j’ai accompli au cours de ce mandat! 

À bientôt :)

Virginie

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